Au-delà du commérage

Par Il Messaggero Avventista

Gérer les histoires des autres de façon intègre et intentionnelle.

Les créatures humaines aiment les histoires. Tout le monde a une histoire, n’est-ce pas ? Nous sommes enclins à écouter les histoires des autres ou à les raconter parce qu’elles nous aident à donner un sens au monde. Les histoires des autres – leurs
triomphes, leurs erreurs et leurs tournants décisifs – qui nous relient à quelque chose de plus grand que nous-mêmes nous
attirent tout particulièrement. La Bible est elle-même une histoire : l’histoire de l’amour de Dieu révélé à travers la vie de personnages bien réels, avec leurs hauts et leurs bas.
Les livres sont des histoires. Les films et les conversations aussi.
Mais dès que nous partageons les histoires au détriment de quelqu’un d’autre, une lumière rouge s’allume. Lorsque nous
troquons la confiance ou la réputation d’une autre personne contre notre propre moment de connexion, nous utilisons son histoire comme une monnaie d’échange et la dépensons sans discernement. Les commérages n’affectent pas seulement la
personne dont on parle. Ils nous affectent nous aussi, et façonnent notre cœur de manières dont nous ne sommes sans doute
pas conscients (Pr 18.8).
Des rumeurs anodines aux propos à saveur spirituelle tels que « prions pour Untel ou Unetelle », les commérages sont omniprésents : au travail, à l’école, à l’église, et chez nous. Personne n’aime faire l’objet de commérages. Par ailleurs, nous serions bien naïfs de penser que nous pouvons colporter des ragots sur les autres sans que ceux-ci ne nous rendent la pareille. Et nous serions tout aussi naïfs de croire qu’une personne qui colporte des ragots avec nous ne finira pas par colporter des ragots sur nous. Le commérage se fait rarement à huis clos. Mais au-delà du risque social, quelque chose de plus profond se produit.
Le commérage comble souvent le vide qui devrait être occupé par une véritable vulnérabilité. Lorsque nous ne sommes pas prêts à nous ouvrir sur nos propres difficultés ou nos insécurités, nous empruntons la vulnérabilité de quelqu’un d’autre. Cela nous donne le sentiment d’être connectés non à nos dépens, mais – quel soulagement ! – aux dépens de quelqu’un d’autre. C’est justement ce type d’impulsion qui a conduit Cham à exposer la honte de son père à ses frères (Gn 9.21-24). Mais comme la malbouffe, les commérages sont des conversations qui nous laissent sous-alimentés sur le plan relationnel. Il se peut qu’ils s’avèrent satisfaisants sur le coup, mais au final, ils nous laissent terriblement vides.

C’est tentant, non ?

Je suis souvent tenté par les relations superficielles que les commérages procurent. Un jour, je me suis surpris à partager des choses que j’aurais dû garder pour moi. Je prie Dieu de m’accorder le discernement et de résister à cette tentation. Les trois questions suivantes m’aident à être plus intentionnel dans la manière de gérer les histoires des autres, soit avec
intégrité et bienveillance.

  1. SERAIS-JE À L’AISE DE DIRE TELLE OU TELLE CHOSE EN PRÉSENCE DE LA PERSONNE CONCERNÉE ? (MT 7.12)

Si on se rend compte que les mots auront une connotation différente en présence de cette personne, alors il vaut la peine de reconsidérer la situation. Les Écritures nous mettent en garde contre le fait de profiter des limites de quelqu’un – dans ce cas-ci son absence – pour lui nuire (Lv 19.14). Cette question peut constituer un test simple mais puissant pour évaluer notre intégrité et notre amour.

  1. EST-CE QUE J’ÉVITE DE ME MONTRER VULNÉRABLE ? (MT 7.3-5)

Parfois, nous choisissons de « révéler les secrets » de quelqu’un parce que cela nous semble plus sûr que de partager les nôtres. Mais en réalité, les commérages sont un moyen d’éviter toute relation véritable. Cela ne veut pas dire que nous devons exposer notre vulnérabilité à tout le monde ! Il faut plutôt nous demander : Est-ce que je parle de cette personne pour éviter d’être honnête envers moi-même ?

  1. CETTE CONVERSATION FAVORISERA-T-ELLE LA CROISSANCE SANS DÉNIGRER LE CARACTÈRE DE QUELQU’UN ? (EP 4.29)

J’ai un ami proche qui ne colporte jamais de ragots. Bien que doué d’un esprit critique (il est titulaire d’un doctorat), il voit toujours le meilleur chez les gens. Il n’est pas animé d’un optimisme toxique et n’évite pas les conversations difficiles. Cependant, il n’est jamais ennuyeux : ses conversations sont sincères, captivantes et significatives. Il m’a dit un jour : « Chaque fois que je parle, je prie pour que mes paroles informent, inspirent, ou édifient. »
Paul exhorte les Éphésiens à parler de façon intentionnelle, à utiliser des mots qui édifient leurs semblables (Ep 4.29). Ça ne signifie pas pour autant que nous devons ignorer les comportements nuisibles, ou nous taire lorsque la vérité doit être dite. Même Jean a mis les croyants en garde contre un certain Diotrèphe, qualifiant son orgueil et ses calomnies de menace pour la communauté (3 Jn 9.10). Il y a un temps et un lieu pour dire des vérités difficiles. Mais même dans ce cas, notre objectif doit
être la croissance et la protection, non la critique et la diffamation.
Le commérage n’a rien en Jésus. Notre sauveur est à la fois honnête et respectueux de nos histoires ; il assume notre honte à ses propres dépens et nous permet d’être vulnérables en toute sécurité. Il n’est pas facile au début de choisir une relation authentique plutôt qu’une relation factice.
Tout comme une alimentation saine, cela demande un effort quotidien. Mais plus fondamentalement, cela nécessite un changement d’appétit – un changement que seul Jésus peut opérer en nous. Il nous invite à porter un joug plus léger : des conversations honnêtes, vivifiantes, et enracinées dans l’amour.

De David Buruchara, M.Ed., LPC-R, thérapeute de couple passionné par les liens entre la santé mentale, les relations et la foi.
Source : Revue Adventiste, novembre 2025

Commentaires

Ajouter un commentaire

Votre commentaire sera modéré par l'équipe du site si nécessaire.