Main Menu

YVONNE, SIMÉON ET LA PROMESSE D’UN AVENIR

Shares

Aimerais-tu la tenir dans tes bras ? me dit la jeune mère. « Elle s’appelle Yvonne. » Et au même instant, elle me tend un petit paquet vivant, tout rose, pesant près de trois kilos. Elizabeth sait fort bien ce que j’éprouve pour les bébés. Il y a des années, à une église dont j’étais le pasteur, elle m’avait entendu parler du miracle de la procréation. Étant médecin maintenant, Elizabeth sait de quoi il s’agit ! Il y a trois jours, elle a mis cette magnifique petite fille au monde.

Aujourd’hui, ses parents, sa sœur, et deux neveux débordant d’énergie sont chez elle pour accueillir Yvonne au sein de cette merveilleuse famille. Fredonia, ma femme, et moi sommes heureux de nous joindre au clan. Un grand dîner nous attend. Grand-Mère a apporté l’entrée et le gâteau.

Yvonne, qui porte un mignon pyjama rose, est dans mes bras ! Ses jambes, ses bras, ses doigts, tout fonctionne à merveille. Je la regarde attentivement. Qu’est-ce qu’elle est petite ! Son visage est un peu ridé, sa tête, un peu écrasée… à moins que mon imagination ne me joue des tours ! Cette petite n’a que trois jours ! La voilà qui s’agite, prête à pleurer, comme si elle m’interrogeait : « Dis, est-ce que tu m’aimes ? »

Je lui murmure quelques paroles douces en la serrant dans mes bras. “Elle est habitué à l’espace restreint du ventre de sa mère », dis-je à Grand-Papa qui, à l’autre bout de la pièce, esquisse un sourire d’envie.

Il est médecin, lui aussi. Et je me dis : « Ah non, je la garde ! N’était-il pas présent lors de sa naissance ? Il a eu son tour ! » Les conversations vont bon train. Il y a tant de choses à échanger ! L’heureuse maman converse tantôt à gauche, tantôt à droite. Elizabeth semble apprécier son rôle d’hôtesse, elle qui pourtant vient d’accoucher. Elle m’étonne vraiment. Ah, quelle famille rafinée, intelligente, chaleureuse ! Mais la petite princesse s’agite – et son visage se plisse. Avec tendresse, je serre sur mon cœur cet être humain si précieux. Yvonne entend-elle mon cœur – sent-elle ma respiration ? Ma voix lui procure-t- elle assurance et réconfort ? Elle se détend. Quelque chose en moi s’émeut. Et je dis au nouveau père : « Ça lui fait du bien d’entendre une voix masculine. » Il est en train de disposer les chaises. « Les enfants ont besoin d’entendre la voix de leur père. N’es-tu pas d’accord ? » Il sourit avec indulgence.

Maintenant, ma petite amie est réveillée. Elle ouvre les yeux, bâille, bouge ses bras et ses jambes. Je mets mon petit doigt dans sa main ô combien minuscule. Elle le saisit et ne le lâche pas ! Ma voix s’éclaircit et – c’est plus fort que moi – je renifle d’émotion. Je m’exclame : « Ces yeux ! Deux incroyables caméras coordonnées par un ordinateur infaillible juste derrière ! » Je touche doucement l’arrière de sa tête. « Bientôt, ils vont s’ajuster. » De nouveau, Yvonne s’agite, comme si elle ne se sentait pas en sécurité. Je la presse doucement sur mon cœur. Nous nous sentons mieux tous les deux.

« Mais qu’est-ce qui se passe avec toi ? Tu es en transe, ou quoi ? » me lance Fredonia d’un ton amusé. « Non, non, je réfléchis ! »

Tenir un bébé est pour moi un acte d’adoration. En cet instant même, mes pensées et mes sentiments se tournent vers Dieu. Au supermarché, il m’arrive parfois de dire aux commis qui m’aident à mettre mon épicerie dans les sacs,
« Je suis un vieillard plus vieux que le pape ! » Mes jambes sont moins fortes qu’avant ; mon dos me fait mal. Mes doigts, tordus par l’arthrite, n’appuient pas sur les bonnes touches du clavier de l’ordinateur. Mes genoux ne sont plus ce qu’ils étaient. Mon cœur, muni d’une valve mécanique, a besoin de se renforcer. Je dois subir une opération des cataractes depuis longtemps. Et un nouvel appareil auditif ne me ferait pas de mal ! Quand je prêche, j’ai besoin d’aide pour descendre de la plateforme… Ne riez pas ! Ce n’est pas drôle ! En plus, nous vivons à une époque angoissante. Et quand j’y pense, je me sens tout tremblant.

C’est alors que mon âme soupire après la voix de Dieu. J’ai besoin de sentir sa respiration, besoin qu’il me serre sur son cœur, besoin qu’il tienne ma main noueuse. J’aimerais bien savoir ce qu’il ressent en voyant ses enfants agités, impuissants, ses enfants créés à son image, créés pour être comme lui ! Des paroles familières des Écritures me traversent alors l’esprit et m’inondent de paix, d’assurance, et de compréhension : « Comme un homme que sa mère console, ainsi moi je vous consolerai » (Es 66.13). Je m’imagine le bon Berger tenant les agneaux contre sa poitrine, et j’entends sa promesse : « Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28.20)

Mais reculons d’environ 2 000 ans. Nous sommes dans le temple de Jérusalem. Là, se trouve un homme avancé en âge, un homme qui attend « la consolation d’Israël » (Lc 2.25). Regardez !

Qu’a-t-il dans ses bras ? Un petit bébé, un bébé né de paysans venant de Nazareth ! Se pourrait-il que le voyage de cinq jours à dos d’âne ait précipité le moment de sa naissance ? Tandis que le vieux Siméon tient tendrement l’enfant Jésus contre son cœur, il sait que cette « semence » d’Ève, ce frère de sang de l’humanité, va vaincre le mal et apporter le salut aux Juifs et aux Gentils. Regardez le bébé ! Ses yeux, ses mains ! Aujourd’hui, puis-je partager la révélation faite à ce vieillard tandis que je tiens la petite Yvonne ?

Je pense maintenant à Theodore Roosevelt. Cet homme autrefois vigoureux, ce gaillard qui avait dirigé les célèbres « Rough Riders* », était maintenant à la retraite, affaibli par la souffrance et la malaria. Vous souvenez-vous de ce courageux président américain tenant son « gros bâton » ? Eh bien, un jour, il se retrouva au parloir avec un petit bébé dans les bras – l’enfant de son enfant. Dominé par l’émotion, il ne parlait pas, ne riait pas. Des larmes roulaient sur ses joues… Il pleurait. Oui – il pleurait ! C’est ça le plus merveilleux, je pense. « Ne vous en faites pas, M. le Président. Nous comprenons. Ne vous en faites pas ! »

Le temps passe. Yvonne grandit à merveille. C’est maintenant une écolière aux yeux pétillants et au sourire lumineux. Elle fait l’école à la maison – sa maman lui donne avec sagesse la meilleure éducation. Merci, Elizabeth – oui, et toi aussi, Papa, et Grand-Père, et Grand-Mère, de m’avoir invité ! Jamais je n’oublierai cette visite sublime.

Et un gros bisou pour toi, Yvonne. Un jour, si nous sommes fidèles, toi et moi ferons plus ample connaissance, nous apprendrons à vraiment nous connaître ! Tu sais ce que j’aimerais faire ? J’aimerais faire une promenade avec toi, peut-être même courir le long du fleuve de la vie avec toi. Tu sais, ce fleuve qui jaillit du trône de Dieu – dans un monde meilleur, un monde plus sûr !

Oliver L. Jacques a servi en tant que pasteur, professeur, missionnaire, et administrateur. Il s’est éteint en septembre 2012.

* Rough Riders : nom donné au 1er régiment volontaire de cavalerie, levé en 1898 lors de la guerre hispano-américaine.

 

CRÉATION : QUAND FOI ET SCIENCE SE RENCONTRENT !
DES AUMÔNIERS VAUDOIS À LA RÉSIDENCE LA GIRARDE

Laissez votre commentaire

ESPOIR MÉDIAS

Top